Moïse avait le Décalogue, Edouard Philippe un Catalogue ou les « dix commandements » du gouvernement.
M. Edouard Philippe, nous transmet lui son Catalogue
de bonne conduite des ministres via une circulaire paru dans le Journal
Officiel de Jeudi 25 mai 2017 (soit le « jeudi de l’Ascension »,
ça ne s’invente pas).
I. Cette circulaire relative à la méthode de travail, se
propose dans son préambule que « le Gouvernement doit renouer avec les
Français l'indispensable confiance sans laquelle il n'est pas d'administration
efficace. L'organisation de l'action gouvernementale doit ainsi répondre à une
triple exigence d'exemplarité, de collégialité et d'efficacité ».
1.
Les ministres doivent agir avec exemplarité, c’est-à-dire intégrité, dignité et probité, afin d’assurer la plus grande transparence possible.
« L'exemplarité
est le fondement de la confiance accordée par les Françaises et les Français au
Gouvernement. Chacun de ses membres doit traduire cette exigence dans son
comportement, que ce soit dans l'exercice de ses fonctions ou en dehors de ses
engagements publics. L'intégrité, la dignité et la probité sont au cœur de
l'action publique. » Le premier ministre rappelle qu’il faut satisfaire
aux obligations de la loi du 11 octobre 2013 modifiée relative à la transparence
de la vie publique : loi
qu’il a combattue et qu’il applique, dans son cas personnel avec la plus grande
des mauvaises fois. Il demande également à son équipe gouvernementale l’adoption
d’« un comportement modeste et respectueux de chacun ».
2.
L’organisation gouvernementale repose sur la collégialité et la solidarité et agit en toute impartialité
et en concertation avec ses collègues.
« L'action gouvernementale est une action collective
fondée sur une claire répartition des responsabilités. (…) La discrétion est le
nécessaire complément de la collégialité et de la solidarité. » En bref,
ce qui se passe au Conseil des ministres reste au Conseil des ministres.
Responsable, le ministre « doit veiller à la bonne information de ses
collègues » et faire reposer son action sur une
« (…) pour être pleinement efficace la méthode de
travail gouvernementale s'appuiera également sur une nouvelle gouvernance (…) ».
Ainsi les ministres doivent-ils agir en toute responsabilité, assumer leurs
décisions, et ne recourir à l’arbitrage du chef du gouvernement qu’en cas de
blocage.
S’il est vrai que cela va toujours mieux en le disant, il
est regrettable d’être dans une situation de probité politique où de telles instructions
sont nécessaires aux plus hauts représentants de l’Etat.
II. Les adorateurs du Dieu unique Macron verront là une
innovation. Pour un historien des religions comparées, on y verra qu’une reprise
et modernisation de rites anciens.
En effet, le président François Hollande et le premier
ministre Jean-Marc Ayrault avaient demandé à leurs ministres de s’engager sur
une « Charte de déontologie du gouvernement » (12 mai 2012). Cette
charte dictait quelques principes simples qui [devaient] guider le comportement
des membres du gouvernement. » Celle-ci était composée de 5 points :
- Solidarité et Collégialité
-
Concertation et Transparence
-
Impartialité
-
Disponibilité
-
Intégrité et Exemplarité
Cela ne vous rappelle rien…
Cette charte n’était pas plus une innovation
que la Circulaire Philippe. Déjà, M. Michel Rocard dans une circulaire
relative à la méthode de travail du gouvernement, en date du 25 mai 1988,
précisait, de manière plus détaillée, la déontologie qu’il attendait de son
équipe.
La notion de « disponibilité »
qui consiste, selon la charte de 2012 à demander aux « membres du
gouvernement consacrent tout leur temps à l’exercice de leurs fonctions
ministérielles. Ils doivent, de ce fait, renoncer aux mandats exécutifs locaux
qu’ils peuvent détenir. » A croire que notre premier ministre est plus
enclin à fournir un effort sur la transparence de son patrimoine qu’à « lâcher »
ses mandats. Il ne faut oublier que l’actuel Maire du Havre, Député de la
Seine-et-Marne, Président de… etc… (voir
mon article) était également contre la loi sur le non-cumul des mandats.
Ne soyons pas médisants et considérons que le président de
la République a suffisamment été claire sur le sujet.
III. Quel sera l’effet du texte…
Difficile de connaître la portée d’un texte qui ne définit
pas réellement de sanctions contre un éventuel contrevenant, ni la procédure applicable,
ni les recours juridiques.
D’abord, la question de fond qui reste posée est celle de la
responsabilité du ministre. D’importants progrès ont été réalisés ces dernières
années en matière de droit constitutionnel. Mais il faut aller plus loin. C’est
ce que je propose dans ma proposition de loi constitutionnel (en lien).
Ensuite, les précédents textes n’ont pas permis d’éviter les
scandales politiques de ces dernières années.
Enfin, rien n’est prévu quant au comportement du président
de la République.